L'homme au sens traditionnel »
Mais parlons de yin yang. On ne dit pas yin et yang, cela traduirait une incompréhension de cet aspect
de la philosophie orientale, car l'un ne peut exister sans l'autre.
Ils sont complémentaires : les montagnes créent les vallées ; pas de montagnes pas de vallées.
Ce sont les honnêtes gens qui créent les bandits : quand vous définissez le statut des honnêtes gens,
vous définissez en même temps le statut de ceux qui ne sont pas honnêtes.
Si la main à une paume elle a obligatoirement un dos, etc. Les premiers écrits qui font mention
de yin yang datent du IIIe siècle avant Jésus-Christ.
Pourtant ces notions sont bien antérieures et remonteraient aux premiers astronomes chinois.
En aïkido "La notion omote /ura" un outil précieux
pour les pratiquants du dojo aïkido à Lyon 69
On trouve ce symbole couramment employé par des auteurs aux spécialités
diverses entre le premier et cinquième siècle avant Jésus-Christ :
calendriers, musique, géographie, saison, théorie politique, philosophique,
divinatoire, médicale, etc.
Notre logo (hotou)
évoque aussi le yin/yang »
Les astronomes chinois avaient une mission délicate importante. Ils étaient chargés de la confection du calendrier qui réglait tout : irrigation artificielle, prévisions des pluies, mousson, etc. Toute erreur était sanctionnée. On raconte que deux frères, Hui et Ho, furent condamnés à mort pour n'avoir pas su prévoir une éclipse de soleil. N'oublions pas qu'avant l'époque du Christ, chaque village possédait un sismographe. Cette société, à 90 % agricole, devait générer une tradition qui, encore de nos jours, est employée dans divers domaines, à commencer par l'aïkido traditionnel.
Agriculteurs, ils s'aperçurent très vite que rien ne se produisait sans le ciel, le soleil, la pluie etc. donc il fallait très vite savoir comment cela s'organisait, et quelles étaient les lois qui régissaient tout cela. La dualité n'était qu'apparente ; aussi n'ont-ils jamais classé les choses en famille, en genres, comme nous, mais ils ont essayé de comprendre les interrelations entre toutes les choses. Certaines évoquant le yin, par rapport à d'autres moins yin qui évoquaient plutôt le yang. Prenons un exemple : le nord est de nature yin par rapport au sud qui est de nature yang. On peut dire que Paris est plus yin que Marseille. Mais Paris est plus yang que Bruxelles. Yin yang, omote ura, le principe est le même. Nous ne sommes pas habitués à cette évolution dynamique, c'est pourquoi très souvent en aïkido on trouve des listings des techniques omote, des techniques ura, bien figées. Cela correspond parfaitement à notre formatage occidental, mais c'est une mauvaise compréhension du principe oriental yin yang. On comprend l'absurdité de ceux qui classent les choses en yin et en yang. Tel aliment est classé yang, l'autre est classé yin, et vous obtenez la macrobiotique, une théorie japonaise inventée par Georges Oshawa, basée selon lui sur la médecine orientale. Ce n'est pas parce que l'on est japonais et que l'on affirme ce qui précède que c'est forcément juste. La preuve !
Ce genre de raisonnement primaire pourrait faire dire que les Européens sont tous des spécialistes de mathématiques quantiques... car cette invention est occidentale ! De la même façon, tous les orientaux ne sont pas des spécialistes de la philosophie orientale ou de l'aïkido.
Cette méconnaissance du principe yin yang nous a valu des décennies d'aïkido où nous avons pratiqué des techniques positives, d'autres négatives, etc.
"Dire que la pensée chinoise n'est pas cartésienne est une évidence. Dire qu'elle est irrationnelle est une sottise." Inna Bergeron
La civilisation occidentale positiviste, matérialiste, analytique, qui évoque le yang par rapport à la pensée orientale, a un alphabet très abstrait qui ne représente aucune réalité mais des signes conventionnels. L'orient très synthétique, où le hasard n'existe pas, où tout est dans les interrelations entre êtres et choses, a une écriture très concrète où l'on dessine la réalité. Normal qu'un oriental procède de la même manière pour la compréhension de ce qui l'entoure.
Venons-en maintenant à la signification du mystérieux couple yin yang, qui n'a pas notre sens que le coté éclairé yang, et le coté à l'ombre yin. Étudions ces deux caractères :
Ce n'est pas facile de parler de cet aspect de l'enseignement d'Alain Peyrache.
Le "Taïki" et le "hotou"
2 figures utilisées par les pratiquants d'aikido du dojo de Lyon 69
Hotou »
Le Taïki ou le Hotou nous expliquent que tout ce qui parait différent dans ce qui existe n'est ni plus ni moins que le jeu du yin yang, et que la proportion de l'un et de l'autre explique cette diversité. L'étude des arts traditionnels orientaux, dont l'aïkido traditionnel, ne consiste pas à compiler des listings de techniques pour montrer que l'on est très savant — ce que font les gens qui n'ont rien compris à cette discipline, et qui expriment leur formatage occidental scolaire, universitaire, dans l'aïkido — mais à observer, et travailler ce qu'il y a de commun dans toutes ces techniques. Autrement dit, comprendre le principe yin yang. L'objectif de seulement collectionner les manifestations du yin yang est une tâche infinie, complètement stupide, et qui ne mène à rien.
Ce que la sagesse orientale traduit par "vous avez compris le principe yin yang sans sortir de chez vous, vous connaissez le monde entier ; vous parcourez le monde entier sans connaitre le principe yin yang, vous n'aurez rien compris."
Malheureusement notre éducation occidentale nous formate pour la mauvaise solution,
c'est ce qui fait toute la difficulté des pratiquants d'aïkido.
Être capable d'aborder les autres cultures en oubliant la nôtre est vraiment très difficile.
Attention de ne pas prendre dans les grandes traditions que ce
qui ne dérange pas nos habitudes (Danielou. A)
C'est pourquoi l'étudiant d'aïkido qui s'attend à trouver un sport est complètement désorienté.
Par contre celui qui veut s'enrichir intellectuellement, avoir un développement personnel, c'est une voie incomparable. Comme un miroir, l'aïkido nous renvoie notre image. Et celle-ci ne nous plaît pas toujours, alors certains choisissent la fuite : ils arrêtent pour un prétexte quelconque, alors que d'autres n'en sont que plus motivés, voyant toute la richesse qui les attend. Là encore on retrouve le jeu du yin yang. Le constat que faisait bouddha :
L'œil mental de l'homme est comme un lotus :
Certains dont l'œil mental est, comme certains lotus, sous la vase : même en nettoyant ils ne comprendront rien à la doctrine.
D'autres affleurent la vase : pour ceux-là il suffit de nettoyer pour qu'ils comprennent.
D'autres sont au-dessus de la vase : il n'est pas besoin de leur expliquer la doctrine.
Ce symbole est fréquemment utilisé non seulement par les pratiquants d'aïkido,
mais par des bijoutiers, des surfeurs, etc. Son esthétique y est certainement pour quelque chose. Le langage symbolique et les symboles orientaux traduisent des enseignements. L'avantage est qu'on n'a pas besoin de connaître la langue. Ne pas maîtriser ce langage symbolique indique l'incompétence et l'ignorance. C'est pourquoi très fréquemment on trouve ce symbole accompagné d'un délire judéo-chrétien, même par des maîtres japonais -- paradoxe incroyable! -- chargés de nous enseigner leur culture.
On a tous connu -- on connaît encore -- par le langage de certains aïkidokas, des techniques
dites "positives" d'autres dites "négatives". Cela colle parfaitement avec notre culture dichotomique.
D'où une production de listing technique avec des techniques positives ou négatives.
C'est sûr, cela fait très électronique, très savant, mais c'est complètement absurde et n'a aucun rapport
avec la philosophie orientale.
Le Taiki autre logo courant en aïkido »
Le "taïki" un autre symbole que l'on trouve en aïkido
À ce symbole du Taïki (le grand homme : l'homme révélé, réalisé...),
Alain Peyrache préfère celui du Hotou, bien moins utilisé mais bien plus parlant.
C'est pourquoi nous le retrouvons sur toutes les productions de l'école. Avantage sur le précédent, il montre que tous les aspects de la manifestation ont pour origine le non manifesté, le té.
Combien de professeurs d'aïkido vous diront en parlant de votre aïkido "c'est bien", "c'est mauvais" ? En aïkido traditionnel, cela n'a aucun sens. Dire que quelque chose est bon ou mauvais -- concept judéo-chrétien -- repose sur la comparaison, et est le concept personnel que vous vous faites du bien avec ce que vous voyez. Votre conception personnelle du bien vous est propre, elle n'appartient qu'à vous, chacun a la sienne. Donc lorsque vous dites c'est bon ou mauvais, vous exprimez votre subjectivité propre, ce qui n'a aucun intérêt. Ce n'est qu'un point de vue.
Fréquemment on dira aussi "cet élève a le niveau de shodan ! " Là encore c'est une tournure purement occidentale qui n'a aucun sens en aïkido traditionnel. C'est du langage de sportifs, comme précédemment. En effet, lorsqu'on parle de niveau, on a un étalon en tête. Là encore, ce n'est qu'un Point de vue personnel, qui changera d'un individu à l'autre. La pratique de l'aïkido traditionnel nous apprend que la qualité ne se mesure pas, elle s'apprécie. Prenons un exemple en musique dire que Chopin a le niveau de Bach, cela n'a aucun sens. Seuls les sportifs mesurent des performances afin de comparer, et de voir qui est la vedette, le meilleur, celui qui a le record. C'est pourquoi un sportif définit les conditions d'une performance, une norme, afin de pouvoir les comparer et les gérer dans le temps.
En aïkido c'est exactement l'inverse : chaque individu étant différent, il pourra, tout en respectant les fondements de l'aïkido, exprimer sa propre personnalité, comme le ferait un peintre, un musicien, ou n'importe quel artiste. D'ailleurs le fondateur de l'aïkido n'a-t-il pas dit très modestement : "Je suis parvenu qu'au premier stade de l'aïkido, j'espère que d'autres iront plus loin... ». Dans le système menkyo (grades traditionnels) le dernier certificat autorise l'élève à créer sa propre école, son propre courant, à partir de ce qu'il a appris avec son maître. C'est ce qui fait la richesse des arts martiaux japonais où les hommes exceptionnels, comme le fondateur de l'aïkido, ont pu créer des disciplines martiales particulièrement intéressantes. Le sport avec sa norme donne une pratique figée, stéréotypée, qui ne correspond à personne et qui n'a aucune chance d'évolution. Dans un tel contexte, la seule évolution possible d'un point de vue aïkido est uniquement politique : le dernier compromis fédéral.
De la connaissance de la philosophie de l'aïkido dépend directement la qualité de la pratique.